mardi 28 décembre 2010

UN SOIR DE NOEL

Gabriel retrouve un usage immodéré du mot "non" dès que j'évoque sapins ou guirlandes. Et ce n'est pas pour lui une question de mode, car entre les cartons de vieilles décorations rouges et vertes du grenier et mes velléités de bleu, noir et argent, il a le choix. La question, c'est que nous nous sommes bien trouvés. Je n'insiste pas parce que je ne le ferais que par convention.
Des familles vaguement méprisantes pour le rejeton numéro deux un peu trop olé-olé, une ambiance de Noël qui se traduisait plus par un air de punition que par une musique de fanfare, et nous avons développé dans l'enfance une indifférence à la fête au sapin.
De nos jours, mes parents organisent deux repas de Noël.
Le 24 au soir en famille, sans moi. Ça date de l'époque où il ne fallait pas que le reste de la famille sache, pour moi. J'étais intransigeant, je ne voulais pas venir sans mon copain. Je revois mon oncle depuis un an, mais le système perdure, je ne suis pas invité. Les "gros" cadeaux s'échangent sans doute là.
Puis début janvier, un deuxième repas un dimanche midi me permet d'être avec les mêmes... Les cadeaux que je reçois n'ont rien à voir avec ma personnalité, par exemple je ne lis pas de livre de prosélytisme religieux. Ce jour-là, ma sœur m'évite, mes parents font une figure désolée, la nièce que je vois est chaleureuse mais étonnamment muette. Mon autre nièce, que je ne fréquente pas, est mondaine avec moi, elle m'invite à la voir "plus souvent" mais en huit ans elle ne m'a ouvert sa porte qu'une fois.
Ce repas est une corvée, Gabriel dit que toute personne sensée qui débarque chez eux ce jour-là voit de suite qu'ils sont tristes et complètement névrosés. Je gère généralement le réchauffage des plats, le service et la vaisselle, en embauchant les plus jeunes, ça m'occupe un peu. Chaque année je me dis que je vais mettre les pieds dans le plat et déclencher l'opération vérité. Cela prouve que je suis aussi névrosé qu'eux, dans un autre genre. Car à part des mensonges gênés et des silences pesants je n'en obtiendrais rien.
C'est un peu le même genre du coté de Gabriel. Nous n'avons donc pas trop l'esprit de Noël.

Duffy : don't forsake me (son très mauvais au contraire du cd)
Ma maison est tout de même ornée d'une guirlande lumineuse, parce que la plupart de celles de la place sont illuminées. Les voisins nous acceptent tels que, je pense qu'ils le méritent.
Nous sommes donc convenus, Gabriel et moi, de ne pas nous faire de cadeaux pendant les fêtes, mais de nous bâfrer et d'écumer la vidéothèque domestique. De cette façon il n'y a pas de rappel douloureux, et on est un peu dans le ton quand même. Nous avons appliqué à la lettre ce programme ces dernières années, mais vendredi soir, tout se passait bien jusqu'à ce que...Gabriel me demande un arrêt sur image.
J'actionne la télécommande sans déranger la chatte lovée sur mon pull, et en attendant le retour de la chienne et du fumeur, je zappe sur les ennuyeux écrans des chaînes tnt. A ma grande surprise il revient avec deux paquets-cadeaux, qu'il met dans ma main paralysée.
Je regarde l'heure : minuit pile. Je retourne vers sa tête, il est hilare, très fier de son effet. Je bégaye. Puis j'ouvre les papiers, et je le regarde du coin de l'œil. Il a l'air inquiet, quand même. Il a tort, je suis touché. Ce sont cinq livres, tous mieux choisis les uns que les autres. Un essai d'un vrai philosophe, le genre de livre que je suis seul à pouvoir m'acheter. L'autobiographie d'Edmund White, auteur culte. Une biographie du régent, personnage historique dont nous avons parlé il y a six mois. Et deux romans grand public d'écrivains que je suis. Je me jette sur lui, ce qui met fin à son inquiétude.
Le film a affiché un arrêt sur image de deux heures dix sept, et "Ghost" a repris. Très bon film pour Noël, finalement.
J'ai rongé mon frein samedi et dimanche, et lundi j'ai dévalisé le rayon disque pour lui faire deux cadeaux à mon tour. Le premier ce sont les disques de pop et de jazz qu'il aime. Le deuxième c'est de me taire pendant les soixante-dix premières écoutes en boucle avant de demander grâce.
Et maintenant, trois jours après, je ne sais plus où j'en suis. Où en est ma déprime de Noël? De toute façon en ce début de soirée plus personne sur la place n'arrive à réfléchir, car le volume de la chaîne hifi à fond dans la pièce à coté bloque tous les cerveaux à deux cents mètres à la ronde. Je ferais bien de prévoir une deuxième guirlande pour l'an prochain.
Il est temps que je te souhaite de très bonnes fêtes de fin d'année.

jeudi 23 décembre 2010

LES EMOTIFS ANONYMES

L'émotif sait qu'il doit cacher son émotivité en public. Il emploie donc une partie de son énergie à empêcher les autres de percevoir son émotivité. Ce qui reste de son cerveau est à moitié paralysé par l'angoisse, et avec son pois chiche de neurones encore disponibles, il tente de faire bonne figure.
De deux manières : soit par le silence paralytique, soit par la fausse aisance en paroles. La discrétion extrême le fait juger timide ou sournois, et sous-estimer. Se forcer à prendre part à la conversation le rend maladroit, car il tombe à coté, en fait trop ou pas assez. Il est alors perçu comme méprisant, égocentrique ou hautain.
Dès qu'il est enfin seul, il récupère le contenu de sa boîte crânienne et comprend à quel point il a été nul. Ce qui bien sûr n'arrange pas son problème.

Les émotifs anonymes1
Isabelle Carré dans "Les Émotifs Anonymes"
Son complexe s'exerçant en présence de toute personne, il parvient parfaitement à faire tourner en bourrique les psys, à être un amoureux désopilant et un patron ou un collègue imprévisible, le tout de manière involontaire.
J'imagine que ceux qui sont naturellement très à l'aise en société peuvent trouver le film à peine distrayant, voire excessif, niais ou vieillot.

Les émotifs anonymes2
"Les Émotifs Anonymes"
La grande majorité y trouvera de nombreux prétextes à rire ou à s'émouvoir, le jeu des acteurs étant irréprochable. Même Benoît Poelvoorde se coule dans ce rôle délicat, drôle et touchant, bien fort en chocolat.
A ce propos, après avoir dégusté ce film en salle, il est conseillé de prévoir un petit passage chez un chocolatier, un aussi doué que le personnage d'Isabelle Carré. Tu verras pourquoi si tu le vois.
Les grands émotifs auront du mal à soutenir les images de ce long métrage et seront soulagés par le mot fin. Comment je le sais? Je le sais, c'est tout.

dimanche 19 décembre 2010

PETITS CADEAUX VIRTUELS

J'ai eu envie de faire quelques petits cadeaux virtuels.
Tambour major : Au meilleur animateur de ma partie de la blogosphère J'offre le livre des livres, qui sélectionne lui-même les meilleures histoires écrites depuis les débuts de l'humanité en fonction de l'humeur et des goûts du lecteur.
Deef : S'il plante cette graine dans un pot ou en terre, elle deviendra en quelques jours l'arbre de sérénité, d'une taille en rapport avec l'espace disponible. D'aussi lointain voyage qu'il revienne, quoiqu'il vive par ailleurs, il retrouvera en rentrant chez lui la joie sereine au pied de cet olivier.
Nigloo : c'est une petite boîte, grande comme un ipad, mais qui sert à quelque chose. On peut la brancher sur une éolienne, ou des panneaux solaires et elle stocke toute l'électricité. De l'autre coté on peut brancher toute la maison et se passer des opérateurs, historiques ou pas. La liberté électrique.
Ditom : Ce masque transforme sur scène l'apparence physique du comédien en fonction du personnage que l'on incarne. Avec son talent, à lui les plus grands théâtres.
Alban : Une cape de voyage. Mais une cape qui permet de voyager instantanément. Lorsqu'il revêtira cette cape, il sera transporté dans l'endroit de son choix, lui permettant de passer quelques heures dans un endroit qu'il aime, que ce soit en Écosse ou partout dans le monde. Avec son appareil photo.
Virginie : Un encrier bien sûr. La personne qui disposera cet encrier proche d'elle ne manquera jamais d'inspiration poétique.
Christophe : A chaque fois qu'il chaussera ces lunettes, il verra les personnes et les situations telles qu'elles sont, et non telles qu'on veut les faire paraître, et si elles sont bonnes ou non pour lui.
Fabisounours: La table de prospérité garantit à celui qui la possède de ne jamais manquer de rien. Avec elle chez soi, tout ce qu'il entreprendra réussira, avec pour seules limites son ambition et ses capacités. En plus elle décore très bien un salon et prépare les cocktails.
Jonathan : Cette carte se transformera en carte de membre pour toute activité, club ou parc de loisirs dans le monde entier. Si un dossier est nécessaire, celui-ci se créera tout seul en temps réel pour toute la durée de sa présence. Son possesseur peut essayer tout ce qui existe.
Joss : Vu la récurrence des problèmes dans la cuisine, Ce livre de recettes fait les plats et surtout gère lui-même le frigo, le micro-onde et la vaisselle. Joss se met les pieds sous la table, et profite de ses invités.
Gouli : Le collier de la connaissance, lorsqu'on le porte, donne accès à des informations sur tout ce que l'on regarde. Encore mieux que les casques audio dans les musées.
Nachu : Un baromètre qui prédit avec certitude le temps. Le jardin sera plus beau que jamais
Nicolas : Le meilleur des commentateurs de ce coin de la blogosphère a droit à un film à poser sur l'écran d'ordi, qui fait apparaître automatiquement tous les articles intéressants et les alertes aux commentaires qui pourraient lui plaire.
O d'évian : Le passeport mondial et permanent lui permet de s'évader pour un jour, un mois ou plusieurs années dans le pays qui l'inspire, sans formalité.
Ananas biloba : La main verte, il l'a déjà. Le blog vert aussi. L'anneau qui permet de passer dans le Monde de la fantasy non. Quand il en aura envie il pourra y faire un tour, muni de tous les pouvoirs nécessaires bien sûr.
Kindgay : Ce stéthoscope donnera à celui qui l'a dans sa poche la prescience infaillible des maux dont souffre une personne. Il lui permettra de se concentrer sur les riches relations humaines qu'autorise sa merveilleuse sensibilité.
JF : Le clavier se branche sur une usb. Il développe lui-même des billets de blog géniaux et pas trop longs en partant directement de ses images mentales.
Ginette : un aimant à filles, évidemment!
DocBastoche : Quelle que soit sa spécialité, ce sous-main proposera toujours le traitement le plus adapté sur l'ordonnancier qu'il contiendra. Ses patients bénéficieront ainsi du meilleur traitement possible sans jamais la moindre erreur. La compétence de son propriétaire fera le reste.
Tto : une mallette qui donne à son heureux possesseur le don d'ubiquité. Il pourra donc enfin faire tenir quarante huit ou soixante heures en vingt-quatre.

Hélas après avoir un peu déliré en toute inconscience, il me reste à rejoindre les files d'attente bien réelles dans les magasins pour les derniers cadeaux non virtuels de l'année. Et je n'ai pas le don d'ubiquité.

mardi 14 décembre 2010

HOMO INTERNETUS

Internet a pris une place unique dans nos vies, et elle augmente encore, ce qui soulève des questions. Je me demande en quoi l'usage d'internet change nos comportements?
Sur Internet on consulte, et on interagit, dans des relations professionnelles ou privées. Consulter n'est pas très impliquant, à ceci près qu'il faut trier des masses d'informations incertaines. Tout ce que dit internet n'est pas vrai, bien moins que dans les livres ou journaux papiers. Même wiki est porteur d'informations erronées, ou biaisées.
Les journalistes font leur travail, se professionnalisent et à la longue redeviendront la référence, car une information plus ou moins vérifiée est la seule base possible. As-tu remarqué que les journaux gratuits n'offrent que des infos courtes, style agence de presse, pas d'analyse, pas de recherche? Alors sur internet, il en est de même. Il faudra bien payer pour une info sûre.
En revanche les moteurs de recherche sont sous influence, les opérateurs remettent en cause la neutralité du web, pour des raisons de rentabilité. Je ne serais pas trop surpris de voir apparaître des sites plus ou moins payants aussi, qui sélectionnent les infos pertinentes de façon fiable, mais pour l'instant, puisqu'on ne veut pas payer, fouiller et trier soi-même est indispensable. Internet développe notre capacité à trouver notre chemin dans une jungle épaisse et parfois hostile.
Rousseau la forêt vierge domaine public (pour illustrer la jungle d'internet)
Rousseau La forêt vierge domaine public
L'interaction est la grande affaire depuis quelques années. Lorsqu'un programme politique est mis en ligne, les internautes sont sollicités pour donner leur avis. Mais si l'on gratte un peu, l'exercice du pouvoir reste solitaire, participer, ça anime, mais ne sert pas à grand chose. Les entreprises commerciales, c'est pareil. On suscite des milliers d'articles pour une pseudo révolution avec un nouveau produit, qui sera lui aussi obsolète dans deux ans. Des intoxiqueurs sont payés pour polluer les débats, forums et autres blogs, mentir effrontément et influencer l'internaute. Le produit, une fois déballé, n'est qu'un banal assemblage à peine innovant dont nous nous lasserons en quelques mois. Le marketing est toujours le seul à décider de ce que nous achèterons.
Dans les présentations plus personnelles une chose me frappe : On ne voit généralement pas la tête des intervenants, par contre on sait de plus en plus où ils sont. Cette habitude a des effets pervers: Alors qu'il est proche de moi, pourquoi ce soi-disant ami ne passe t-il pas me rencontrer? L'effet peut-être bien plus dramatique en entreprise : qu'est ce que vous faisiez dans ce quartier, je ne vous paye pas pour faire du shopping. Ou, plus grave : que fait le négociateur de mon concurrent à Lille, il ne serait pas en train de démarcher mon client?
Les réseaux sociaux, en exposant des renseignements qui restent habituellement privés, ont aussi leurs effets inattendus : rejets de candidatures, licenciements de salariés indélicats. Les parents débrouillards aiment également beaucoup suivre ce que fait leur progéniture. J'en sais quelque chose, une personne m'a demandé d'espionner son fils, et ne comprenait pas le refus, puisque c'est presque public! Heureusement il y a les apartés en bas à droite.
Sur Internet, on tombe souvent sur une info de 2007, 2004, ou même 1999. Ça me fait la même impression que de ressortir les anciennes duplications à alcool qui m'avaient permis de faire savoir à tout le collège que j'avais organisé une soirée. Complètement décalé! Une annonce immobilière que j'ai passé il y a trois ans, et la reproduction d'une peinture que j'ai fait il y a plus de cinq ans figurent contre mon gré sur internet, c'est agaçant.
Dans le même genre, il y a aussi tout ce que l'on met sous l'impulsion du moment. On manque de temps, on poste des réactions spontanées, des humeurs, des commentaires qui n'ont rien de pensées éternelles, voire sont gravement maladroits. Dès le lendemain,on l'a oublié, mais cette saleté d'internet nous le renvoie à la figure.
De tout cela, je déduis que l'on doit apprendre de nouveaux comportements :
A chaque fois qu'on met une œuvre ou une opinion impérissables sur la toile, il peut être intéressant de rester maître de sa suppression, ce que beaucoup de sites ou de blogs ne permettent pas. Même si l'on peut effacer, mieux vaut prévoir ce qui se passera si des enregistrements ressurgissent. Il vaudrait aussi mieux s'habituer à la banalisation du mot ami, dommage.
La géolocalisation demande réflexion.
Et particulièrement pour moi qui suis impulsif, je devrais retarder mes publications, me forcer à me relire pour éviter que mes mots ou images ne dépassent de très loin ma pensée, sans parler de l'orthographe.
Ce qui est marrant, pour les vieillards qui ont connu la vie d'avant, c'est que ceux qui sont nés avec internet ne sont pas plus conscients de ces questions. Et des conséquences de leurs actions sur la toile.
Que penses-tu de tout ça?

mardi 7 décembre 2010

HIVER ET RECHAUFFEMENT

Le réchauffement climatique a t-il vraiment lieu?
Si l'on regarde sur dix mille ans, en gros depuis que les hommes ont inventé l'agriculture et l'écriture, le réchauffement actuel est incontestable. Et tout à fait modeste.
Depuis dix mille ans les températures ont varié bien plus qu'en ce moment. Le problème est que nous ne supporterons peut-être pas facilement des catastrophes naturelles en cascade, des pertes économiques lourdes et l'extinction de nombreuses espèces animales et végétales. Ce que nos ancêtres ont vécu, contre leur gré.

Pour éviter ça, nous réglons le chauffage à 19°C, nous trions tout, les papiers, plastiques, compost, verre, piles,vêtements selon le degré de salissure pour la machine, les cailloux dans les lentilles. La poubelle est presque vide quand nous la sortons chaque semaine.
Ça ne sert à rien, puisque les pollueurs sont l'agriculture, l'industrie et les transports, mais ça nous donne bonne conscience. Et ça nous occupe l'hiver : "Tu as monté la chaudière?" "Non, mets donc un pull de plus".
Bon l'hiver, c'est génial. Mais s'il pouvait ne pas durer éternellement comme l'an dernier, on lui serait reconnaissant.

jeudi 25 novembre 2010

DOUCEUR D'AUTOMNE

J'aime l'automne. Surtout depuis que l'école est finie pour moi.
Je savoure une ballade sur les chemins, bien chaussé, avec ces pulls de laine que l'on commence à supporter. L'écharpe est encore entrouverte, les gants sont superflus, l'œil chargé de lumière dorée.
En bonne compagnie, nos deux regards renouvellent le romantisme, nous nous sommes rencontrés dans quelques jours il y a quinze ans, l'alchimie est intacte.
Pays de Loire 25112010 agayfriday licence cc
Pays de la Loire 25 novembre 2010 agayfriday licence cc
Ceux que nous croisons par hasard affichent la solidarité tribale de l'approche de l'hiver, leurs sourires sont chaleureux, comme la couleur de leurs anoraks.
Les arbres se penchent vers nous pour nous raconter toutes les histoires de l'été révolu, leurs feuilles bruissent du passage de novembre.
Pays de Loire 25112010 licence cc
Pays de la Loire 25 novembre 2010 agayfriday licence cc
Au sol ce tapis feutre nos pas dans un murmure unique.
Nous avons envie de partager les sensations dont nous sommes emplis, au crépuscule de la saison.

Pays de Loire campagne 25112010 licence cc
Pays de la Loire: douze châteaux au kilomètre carré. 25 novembre 2010 agayfriday licence cc

Nous revivons nos derniers dîners sous la véranda, où après de bons petits plats, blottis l'un contre l'autre, nous avons profité du soleil couchant jusqu'à la froidure.
On se revoit au bord de mer pour une thalasso d'un jour, à demi immergés dans l'eau tiède, les épaules dans le vent frais, les jets nous massant les pieds avec un chatouillis délicieux.
Nous nous rappelons aussi ce salon de thé chaleureux où nous avons pu paresser en sortant du musée des beaux arts, ses fauteuils de velours rouge et son thé parfumé et réconfortant.

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agayfriday 22112010 tous droits réservés
Même les travaux de la voirie sous mon balcon m'ont plu.
Il nous a fallu attendre cette semaine pour retrouver la légèreté et la puissance du gâteau au chocolat maison qui n'est si bon qu'en ce moment. Question de qualité de l'air sans doute, les papilles s'enchantent des châtaignes ou des premiers vins chauds, du crème à la terrasse colorée et chauffée du grand café de la place.
La chattoune se love souvent sur moi, elle me tient chaud à ronronner son bonheur et le mien.
Le cinéma nous a gâté lorsque la pluie est venue rythmer les beaux jours de la toussaint, nous avons des images plein la tête.
La promenade ne prendra vraiment fin qu'environ dans trois semaines, et d'ici là, crois-moi, j'en profiterai au maximum.

jeudi 11 novembre 2010

TRISTE NOUVELLE

Où suis-je? il fait noir, ici.
Bonjour Flavien. Qui je suis? Tu me connais, voyons, je suis ton... arrière grand oncle Flavien, Flavien.
Oui, je sais, nous portons le même prénom et le même nom.
Il faut que tu me rendes service, mon petit. Je viens de partir, et je n'ai pas pu dire au revoir à Marguerite. Tu dois aller la voir, elle s'inquiète. Nous sommes le dix novembre, et elle n'a pas eu de nouvelles de moi depuis plus d'un mois. C'est horrible, la guerre, j'espère que tu ne la feras jamais.
Comment nous sommes le onze, le jour de l'armistice? Ils ont enfin arrêté cette connerie? Trop tard pour moi, mon petit.
Mais vite, s'il te plaît, cours, je la vois se réjouir, elle saute de joie, elle croit que la guerre est finie, que je vais rentrer, dis lui que je vais bien, que je pense à elle. Mais rentrer, je ne crois pas.
J'ai pris une balle, tu sais, hier.
C'est bête, la veille de l'armistice, c'est idiot, et elle ne le sait pas.
Je t'en supplie, Flavien mon petit, elle est blanche comme l'ivoire, ils viennent de lui dire, fonce, crie lui que ça va, je n'ai pas eu mal, je l'aime.
Ils m'ont pas loupé, les boches, j'ai rien senti, je n'ai pas eu vingt ans, je ne les aurai plus, et le souffle d'un esprit, je suis arrivé à toi.

1910
Dépêche-toi, elle va épouser ce brave gars, mais c'est moi qui suis dans son cœur.
Dis-lui que je l'aime, que je reste près d'elle, qu'elle doit vivre et être heureuse.
Dis-lui,...Comment, tu ne peux pas? En...2010??? Non, en 18! 2010??? Mais alors! Je dois partttttttt...
Je me réveille les joues humides, trop chaud sous les couvertures sans doute. Dans les brumes entre sommeil et conscience, je repense à ce monument, dans l'est de la France, avec mon prénom et mon nom. Ceux d'un frère de mon aïeul.
Flavien, écrit le 11 novembre 2010

mercredi 10 novembre 2010

POTICHE

La potiche, c'est la fille de l'industriel qui s'est mariée par amour, mais dont l'amour est depuis longtemps remisé aux oubliettes. Mère de deux enfants désormais adultes, elle est une caricature de bourgeoise inactive de l'année 1977. Méprisée et négligée par tous, elle voit son heure de gloire arriver à l'occasion d'une faiblesse de son mari, et ne la laisse pas passer.
potiche 2
J'ai pensé brièvement au "Bonheur est dans le pré", ou encore à "La zizanie", qui date de l'époque, mais on est chez le réalisateur François Ozon.
D'un sujet banal, dont l'originalité tient principalement à l'époque dans laquelle il prend place, Ozon tire une comédie brillante. On grince beaucoup, jubile, ricane, s'esclaffe, on rit finalement peu, mais on s'amuse énormément. De nombreux clins-d'œil émaillent la réalisation et les dialogues, citations d'anciens films ou actuelles : "Si vous voulez gagner plus, il faudra travailler plus!". Le sourire ne quitte pas nos lèvres, renouvelé sans cesse par des dialogues cinglants, des situations qui statufient les clichés les plus bétonnés.
Il faut entendre Catherine Deneuve enpermanentée découvrir l'ampleur de son inutilité. Il faut voir Fabrice Lucchini arborer une bouche en cul de poule, tête à claque dans la peau du salaud de service, autoritaire et misogyne.


potiche1
Aucun comédien ne cabotine, mais tous surjouent juste ce qui est nécessaire dans des rôles parodiques. On entre dès les premières minutes du film dans un second degré que l'on ne quitte que lorsque les lumières se rallument.
Un vrai spectacle divertissant et ironique, qui se savoure, tout comme la jolie prestation du toujours admirable Jérémie Rénier.
Et j'ai réalisé que ce film réunissait Catherine Deneuve et Gérard Depardieu, les deux monstres sacrés du cinéma français, ce n'est pas si souvent.

lundi 8 novembre 2010

LA PRINCESSE DE MONTPENSIER

Dans les années 1560, on ne se marie pas par amour. Marie n'épouse donc pas Henri de Guise, dont elle est amoureuse, pourtant un beau parti. Elle fait ce que lui ordonne son père, qui par stratégie la donne à Montpensier.
Il faut dire qu'en pleine guerre de religions, à la veille de la Saint Barthélémy, il ne fait pas bon se tromper de camp. Le comte de Chabannes, joué par Lambert Wilson, l'apprend à ses dépens, proscrit pour ne pas savoir choisir et s'y tenir.

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Marie, elle, est aimée. Par son mari, son précepteur, son ancien amant, et même le duc d'Anjou, héritier de la couronne. Elle navigue dans les sentiments entre ces personnages, et y perd son honneur et ses illusions.
Le spectateur en revanche ne peut être qu'ébloui devant une telle richesse de moyens au service du film.
Les costumes sont d'une vérité et d'une perfection à tomber, comme les décors et l'image. On signalera d'ailleurs que tout le début du film est tourné au château du Plessis-Bourré, à quelques kilomètres d'Angers. Pour l'avoir visité cet été, je conseille les extérieurs, très spectaculaires, qui justifient amplement l'aumône que l'on verse pour les parcourir.
Bertrand Tavernier a fait traverser la France à des meubles d'époque pour garantir l'authenticité du banquet dans la grande salle du château, de même qu'il a soigné les tenues, jusqu'au dernier spadassin au fond d'une scène de bataille.
La_princesse_de_Montpensier_photo_2
Son casting également est irréprochable. Tous les comédiens sont crédibles et fins dans leur jeu.
J'ai apprécié le personnage du futur Henri III, nullement caricatural pour une fois, quoique ses affinités soient passées sous silence. Joyeuse est là, mais leur relation n'est pas évoquée.
La scène avec Catherine de Médicis est remarquable, on plonge dans un tableau du XVIème, fidèle en tous points à la petite histoire. Cette femme a participé à l'une des périodes les plus noires de l'histoire de France en important les mœurs florentines à la cour de France. On aimerait ne pas revivre la même période, sachant que le rejet d'une religion minoritaire et les intrigues politiques sur fond de crise économique ont provoqué cette débâcle.
Un film en costumes de cette qualité ne se voit que tous les dix ans.

Plessis Bourré
Tournage au Plessis-Bourré
Je sais, en ce moment je suis un peu trop enthousiaste à propos de cinéma, il faudrait que je trouve vite à te parler de poésie ou d'états d'âme avant la sortie du prochain Ozon, sinon ce blog va bientôt n'être plus qu'une critique ciné. ..
Pas facile, "Potiche" sort le dix novembre!

mercredi 3 novembre 2010

L'HOMME QUI VOULAIT VIVRE SA VIE

Aimes-tu le comédien Romain Duris? Si non, passes ton chemin, "L'homme qui voulait vivre sa vie" n'est pas pour toi, car il est omniprésent, presque seul dans un road movie qui ne dit pas son nom.
Mais heureusement, si tu as déjà reconnu ses très grandes qualités d'acteur, tu sais qu'il choisit parfaitement ses participations, il a les épaules larges de ceux qui peuvent porter un scénario. Et il en faut, pour conserver l'esprit de l'excellent livre de Douglas Kennedy sans en être esclave, et faire marcher son personnage dans les rails d'une destinée peu commune.
De rebondissements en coups de théâtre, l'homme joué par Duris veut vivre sa vie, d'un milieu superficiel de bourgeois arrivistes à la terre aride d'un nouveau pays.
Romain Duris
Romain Duris
A moitié volontaire, à moitié le jouet des circonstances, c'est en se perdant définitivement qu'il se trouve, c'est en fuyant qu'il s'enracine enfin dans l'essentiel. Certaines séquences signent l'éclair de génie de l'auteur, dans les paradoxes et l'ironie de ce que que la vie lui propose.
Comme mes phrases dans ce petit billet, le film est long, ce qui m'a confirmé une fois de plus qu'une heure trente cinq, cela suffit pour la plupart des intrigues.
Je ne parierais pas cette fois pour une réussite grand public, mais on ne s'ennuie pratiquement pas, l'identification à l'anti-héros est prenante, et les prolongements intellectuels des questions posées par le film tout à fait intéressants.
niels-arestrup
Niels Arestrup
A t-on le dernier mot sur son propre destin ?
Ce long métrage sans concessions répond résolument oui.
Mention spéciale pour Niels Arestrup que j'étais heureux de retrouver dans un joli rôle.
A toi la parole...

jeudi 28 octobre 2010

LES PETITS MOUCHOIRS

Il court sur nos écrans, ceux des salles obscures, un très joli petit film, qui pourrait bien en cacher un très grand.
Il est petit car il parle avec une délicatesse infinie de nos modestes quotidiens. Mais il est grand par le souffle inspiré qui le traverse, et par la vérité et la drôlerie des personnages ou des situations qu'il évoque.
Il est petit dans sa volonté de coller à l'humain, dans les détails de dialogues sensibles et percutants.

les petits mouchoirs.jpg
Il est grand lorsqu'il embrasse l'existence de personnes que nous pourrions être, ou que nous avons rencontrées.
Le temps des vacances, c'est toute la vie dans son comique irrésistible et son tragique ordinaire qui traverse la toile comme les comédiens traversent le bras de mer.

la troupe Les petits mouchoirs
Il est en passe d'offrir un triomphe mérité à son auteur-réalisateur, Guillaume Canet, qui n'en est pas à son coup d'essai, mais à son coup de maître.
Les comédiens, même ceux qui ne le sont pas, sont tous parfaits, certains comme une seconde nature (François Cluzet).
Si tu ne l'as pas vu, vas rire et t'émouvoir devant "Les petits mouchoirs", qui restera une grande réussite de 2010 au cinéma.
N.B. : A ma connaissance aucun des comédiens de ce film n'a jamais fait de déclarations homophobes en public. J'ai entendu Gilles Lellouche prendre parti contre le racisme et l'homophobie. La rumeur le concernant proviendrait d'une confusion avec son frère Philippe Lellouche, qui ne joue pas dans ce film.

vendredi 15 octobre 2010

LE CRI DU LIVRE

Je ressens une véritable angoisse en ce moment : J'ai réalisé, à divers signes, que les livres sont en voie de raréfaction.
Bien sûr je supputais, ainsi que tout un chacun, l'imminence de la catastrophe. L'on allait un jour regarder un écran pour plonger dans l'univers d'un écrivain. Je suis même étonné que ça ait été si long. Mais c'est une chose de comprendre intellectuellement, et une autre de laisser mon instinctive comprenette en découvrir la réalité physique.
Ne plus sentir l'odeur de l'imprimerie, ne plus caresser la tranche, sentir le poids des mots dans ma main amoureuse lorsque j'ai fait mon choix! Depuis que j'ai quatre ans je lis quotidiennement. Mon père m'avait donné avant l'école le moyen de lui échapper à vie. L'objet de papier est devenu aussitôt mon compagnon imaginaire. Rien n'a jamais changé : mon Gabriel te dirait à quel point je suis diplomate, sauf quand on m'empêche de lire. Les livres ont été si souvent ma seule consolation, l'unique lien me retenant de sombrer, que je suis attaché à eux collectivement par le cœur.
Je sais que ce qui compte c'est le fond, peu importe la forme. Sur tablette d'argile, parchemin ou papyrus, papier ou lcd, la pensée du génie reste du génie.
Mais va dire cela à mon corps qui s'est accroché à des ouvrages trop grands pour lui, qui a serré avec émotion de petits poches, va convaincre la peau de mes mains qui ont tourné avec tendresse ces millions de pages! Mon inconscient est comme le nouveau-né qui se suspend au sein, il reconnait ce qui l'a nourri et dont sa vie dépend.

ND-de-Paris
ND de paris
Je m'adapterai, parce qu'il est des renonciations plus fondamentales, parce que je ne veux pas être puéril, parce que ça se fait, parce que le progrès n'attend pas, parce que la vie se vit, elle n'est pas dans les livres.
Quoique.
Je les ai vécus, ces rires qui illuminaient le papier, ces larmes qui déformaient les feuilles. Personne ne me les partageait à ce moment, il m'a fallu attendre d'être adulte pour les mêler à un être vivant, avant c'était avec la pâte de bois ou de chiffon, et la colle.

livre par David Monniaux licence cc
livre par David Monniaux licence cc
Je ne suis pas Cosette, mais c'est son nom écrit à l'encre qui a fraternisé avec ma petite souffrance. Je ne suis pas Croc-blanc, mais c'est le dessin d'artiste de la couverture qui l'a matérialisé dans mes nuits sans sommeil d'enfant. Que ferai-je d'un écran qui s'efface, d'un tas d'électrons à la merci d'une variation électromagnétique? Où retrouverai-je le trèfle oublié dans mon espoir adolescent?
Oui, je l'avoue, je suis fétichiste. Sans honte je vais devenir collectionneur de livres anciens, puis qu'ils le seront tous, de leur naissance post-Gutenberg à leur mort au début du troisième millénaire. Au moins, dans la bibliothèque, je pourrai baigner dans ma douce nostalgie, pour toujours puiser des forces au sein de la mer de papier relié. Et oublier le cri du livre qu'on assassine.
Permets moi encore une petite photo, comme une méthadone à un accro:

bibliothèque
Bibliothèque
Et à présent, pendant que je sens la flamme vacillante de mon courage, dis moi vite quel machin électronique je devrai adopter pour garder le contact avec mes écrivains chéris d'aujourd'hui et de demain.

vendredi 8 octobre 2010

KABOOM

Dialogue intérieur :
-Kaboom est un film brillant, aux tonalités pops, qui prouve qu'un réalisateur de cinquante ans peut parfaitement saisir l'air du temps des djeuns.
- Oui, tu veux dire l'odeur persistante des poudres qui font voir des choses étranges! On a du mal à distinguer la réalité de la fiction, les flashbacks du présent, les hallucinations de l'action.
- C'est ça qui est génial, les hallucinations sont une partie de la réalité, elles éclairent et expliquent le vécu des personnages.
- Mais du vécu, pour qu'il y en ait, il faudrait un scénario! Tu sais, un truc avec un début et une fin, qui ne nous laisse pas sur notre faim! Dans Kaboom, il y a un vague suspense, avec une de ces justifications apocalyptiques chères aux américains, et une fin qui ne ressemble à rien.
- Peut-être, mais avoue que tu ne t'es pas ennuyé.

Kaboom3
Kaboom
- Non, c'est vrai, j'ai été pris par les personnages attachants, un peu paumés, comme quand on a du mal à sortir de l'adolescence. Mais c'est quoi cette sexualité adulte où personne n'a une orientation claire? Que dit-il, à un moment? Il n'y aurait que 6% de vrais hétéros ou homos, tout le monde est bi?
- Tu fais bien de parler des dialogues, ne me dis pas qu'ils ne sont pas drôles, je t'ai entendu éclater de rire de nombreuses fois. Et avoue que les acteurs sont craquants, il y en a pour tous les goûts, et les scènes osées sont légion. J'ai bien vu que le mec de la plage t'avait fait fantasmer.
- A se demander si ce n'est pas le but du film, d'ailleurs. Mais ne pas choisir entre film polisson, thriller métaphysique, comédie de moeurs et drame apocalyptique, c'est risquer de faire un navet. Dont le film est assez proche à mon avis.
-Mais non, c'est un futur film culte, on peut faire des parallèles avec David Lynch, Quentin Tarantino, Gregg Araki est un grand cinéaste!


Kaboom4
Kaboom
Comme tu le vois, j'ai mis trois jours à écrire cette critique tant je suis partagé avec moi-même à propos de Kaboom. Mais en trois jours je ne l'ai pas oublié, c'est donc que j'y ai trouvé un intérêt. A toi de voir.

mardi 5 octobre 2010

PUB ET NAIVETE ELECTRONIQUE

Internet évolue. Avec le premier web, tout était gratuit, enthousiaste, amateur et naïf. Bon d'accord, c'était un peu lent, les bugs étaient quotidiens et la connexion faisait un bruit d'enfer.
On voyait alors des sites sur lesquels figuraient une supplique à l'égard des internautes de passage: « si vous voulez que ce site continue à vivre, cliquez sur l'une des bannières ci dessus, car seule la pub nous finance ». Par bonté d'âme, on cliquait, et rarement on achetait. Il y a donc eu une véritable hécatombe de sites, et les financiers ont surnommé la période "première bulle internet". Et de leur point de vue ce n'était pas flatteur. Mais tout était possible.

windows 95
Avec le 2.0, ça se professionnalise : l'internaute est sollicité pour partager ses photos, vidéos, les réseaux sociaux naissent, avec les blogs, le rss, les wikis.
Les sites ne supplient plus qu'on les soutienne, mais la pub devient omniprésente. Tout reste quasiment gratuit dans un premier temps, internet grimpe dans les campagnes pub, surtout les campagnes d'images. Cela fait espérer aux acteurs que le modèle d'internet est basé sur le forfait illimité, la gratuité apparente, et la publicité rémunératrice.
Ou bien sur les fondations qui délivrent logiciels ou sites "libres".
Wikipédia tente de trouver la juste place entre idéalisme et réalisme.
Bien qu'ils se fassent rares, des polémistes critiquent la pub qu'ils jugent salissante pour la pureté du web. Mais le combat est d'arrière-garde. Car la suite est déjà là.
La manne publicitaire est finalement entièrement drainée par un astucieux moteur de recherche qu'il est inutile de nommer, et quelques rares sites qui peuvent archiver impunément les données des internautes. Et les vendre aux plus offrants. Les spams submergent tout, les forfaits illimités sont menacés, les journaux verrouillent tout ou partie de leurs articles, et les piratages de films auprès des mafias orientales remplacent les mules et sont indéfendables. La rumeur dit que Wiki s'essouffle. En même temps internet devient disponible partout, tout le temps. Et en payant, on pourra bientôt bénéficier de l'audiovisuel en permanence et en tous lieux à un débit parfait.
Nous sommes au bord de la troisième révolution internet, ou je me trompe? Et je me demande de combien sera la facture cette fois.

dimanche 3 octobre 2010

L'ACADEMIE DES JEUNES

C'est un scandale!
J'ai appris que l'un des derniers bastions, avec le sénat, résistant encore au jeunisme ambiant est tombé. L'Académie Française, la fleur de la littérature mondiale francophone, a voté une limite d'âge à la candidature.
Pour être éligible, il faudra être jeune, et il y a là une trahison. C'est que les félons hiérarques ont eux même bénéficié de la mansuétude de leurs pairs lors de leur investiture.
Et à présent qu'ils en sont les élus perpétuels, cheveux blancs et fauteuils orthopédiques, ils revendiquent un rajeunissement honteux. Faites ce que je dis, ne faites pas l'âge que je fais.

Marcel Aymé
Marcel Aymé (Le Passe Muraille)
Ils, et elles, car les femmes ont été de la côterie anti-vieux, veulent voir du jeune, de l'aguichant les rejoindre.
Maintenant qu'il sont eux-même assurés du siège.
Leur démon de midi a occulté les conséquences dramatiques de leur vote. Ont-ils seulement songé que Marguerite Yourcenar ne les aurait jamais rejoint?
Et surtout, surtout, ont-ils réfléchi à l'attente interminable qui va désormais régner sur les élections? Le renouvellement naturel ne permettra plus à un candidat malheureux d'espérer une deuxième chance rapidement. C'est qu'à moins de servir une spécialité à base d'arsenic à la cantine de l'assemblée de Richelieu, les titulaires ont l'espérance de vie pour eux. (Je ne plaide en aucun cas pour l'usage de l'arsenic, ni ne souhaite aucun mal aux académiciens)


Georges Bernanos
Georges Bernanos (journal d'un curé de campagne)
Ils vont s'accrocher à leur rond de velours comme on refuse la tombe, et au final c'est l'académie qui aura encore moins de chance de voir passer en son sein les grands écrivains qui, tels Molière, se verront opposer le règlement.
Oui, vraiment, interdire aux plus de soixante-quinze ans de postuler à l'Académie Française est scélérat.
PS : Marcel Aymé et Georges Bernanos ont choisi de ne pas être de l'Académie.

samedi 25 septembre 2010

VACANCES ORDINAIRES

Retour de la plage. J'espère que personne n'est gêné que je parle de mes vacances alors que la plupart sont rentrés(comment ça, hypocrite?). C'est dur, chaque jour est un pari. La plage était pleine de soleil jusqu'à 17h mais nous scrutons le ciel tous les matins.
25092010
plage 25092010 par agayfriday tous droits réservés
Ici l'eau du robinet a une odeur et un goût infects. Nous stockons une énorme quantité de bouteilles d'eau en plastique. J'ai peur que mon souci d'écologie ne passe après mon envie de vomir en voulant boire l'eau du robinet. Ce matin, en sortant la chiéchienne, j'ai remarqué une camionnette contenant une dizaine d'osmoseurs,(filtres à eau), et le matériel pour les installer.
Il semblerait que la crise de l'eau douce ait atteint le littoral français, et que les communes-champignons préfèrent laisser les habitants se ruiner en installations individuelles plutôt que chercher une solution collective. De plus je connaissais l'existence de ces engins, mais pas leur taille, comparable à un tonneau de 200 litres. J'imagine cela dans une cuisine, converti en pied pour le bar, bof.

garfield
J'ai rencontré Garfield, le chat bovin (bien portant en politically correct), légèrement agressif. Je supplie notre chatounette nouvellement arrivée de ne jamais ressembler à ça.

chatounette
On trouve encore quelques fleurs de dunes qui survivent sur le sable du chemin côtier.

fleurs de dune
La semaine prochaine il faudra renoncer à tout ça, hélas.
Et n'oublions pas qu'en vacances tout est futilité.

lundi 13 septembre 2010

SOIREE de merde

Le lave vaisselle est en panne, et évidemment Gabriel n'est pas là. Super début de soirée : je ne sais plus comment on fait sécher de la vaisselle.
Figure-toi, c'est dingue, on ne peut pas remettre dans les placards aussitôt lavé!

13092010330
Je trouve que la photo est une vraie pub pour le produit magique, non? Je dois encore faire les tasses et assiettes à dessert, mais le soleil se couche.
Heureusement j'ai eu une aide précieuse.

chatoune
Psychologiquement s'entend. Vu comme j'aime faire la vaisselle, les prochains invités, je vais leur jouer la chanson de Benabar, c'était comment déjà?
Rien d'autre à dire? Non, après le coup de fil que je viens de passer, je sais que je suis toujours de la merde pour mes géniteurs, contrairement à leur fille préférée. R.a.s., donc.
Bon début de semaine à toi. Les essais de poésie ce sera un autre soir.

jeudi 9 septembre 2010

FEUILLE D'AUTOMNE

Délaissée par la sève, Elle consent à l'exil.
Elle attend, frémissante aux rayons déclinants,
multicolore la façade de son nid citadin.
La feuille a sifflé sans fléchir le refrain de l'été,
et imagine en la succession des éphémères
la saison éternelle des matins sans sommeil.
AUTOMNE
Mais que sait-elle du monde?
Elle a illuminé de vert la brillance du zénith,
vibré sous les fumées vrombissantes,
et doré à la lueur des noceurs.
Pourtant dans les fragrances entrelacées aux fumets familiers,
elle a pressenti l'existence de l'ailleurs,
une idée consolante à son départ meurtri.
Le jour advient, Eole est l'aile, il la lie aux allants,
la ravit à son père et l'attire aux lointains.
Virevoltant d'ivresse elle effleure ses sœurs,
sensation délicieuse de complicité chantante,
Il la couche en baiser sur le ruban piétonnier,
quand soudain, une douleur écrasante, la semelle torture,
la broyance lacère avec indifférence.
Longtemps elle reste là, éperdument mendiante,
la pluie et la froideur l'entraînent vers la folie.
Mais par chance une nuit Bourrasque la reprend
la sauve au firmament, l'emporte au delà de la ville,
vers le verger, pur et perlé.
Plaquée sur pomme, pêche puis le vieux poirier,
elle s'enthousiasme de richesse colorée,
et rêve de faire partie de ce monde enchanté.
Repartant de tempête elle se perd aux framboisiers,
le rouge des tomates la galvanise en orchestre,
elle voit que le plus beau restait à venir.

Rain_on_nectarines
Un instant les roses la retiennent,
lui permettant d'humer pour la première fois
l'esprit du paradis.
Gorgée de sensations, elle respire enfin.
Le souffle est son ami, il la voyage au loin,
et dans le chatoiement du couchant
la dépose au rebord de la chambre.
Une petite main la prend d'une chaleur insoupçonnée
elle est bien assez belle aux pupilles scintillantes.
L'enfant lisse ses nervures, lui rend sa fierté.
Dans la bibliothèque il lui accorde les pages
et c'est accompagnée des mots de l'écrivain
qu'elle sommeille durablement.
Un soir de l'avenir le livre s'ouvre,
des yeux grandis se fendent d'émotion
car grâce à Elle,
c'est l'enfance qui s'échappe du livre,
escortée par la joie
de l'automne retrouvé.

vendredi 3 septembre 2010

Comment parler de Fredrika Stahl?

Comment décrire de la musique?
Je voudrais partager la voix suave de Fredrika Stahl, sa simplicité virtuose. Mais comment? Je pourrais décrire la technique : Elle se rattache à une pop un peu jazzy, rappelle Norah jones ou Tracy Chapman. Mais les commentaires savants sont hors de ma portée, je n'ai pas la culture pour.
Pour faire people, je pourrais m'informer sur sa sexualité ou inventer les scandales qu'elle n'a pas provoqués. Mais cela m'indiffère. De petits concerts sauvages donnés dans certains jolis coins de Paris ne comptent pas, j'en ai peur.
Je pourrais dans le style descriptif dire qu'elle est suédoise, travaille à Stockholm, possède à 26 ans un niveau musical parfait, qu'elle écrit ses musiques et paroles en anglais comme à l'occasion en français.



Fredrika Stahl Rocket trip to mars
Un label français a produit en 2006 son premier album, son deuxième en 2008 et le troisième en 2010, Sweep me away ("efface-moi"?). Mais aucun renseignement de ce genre ne donne particulièrement envie d'entendre un artiste.
Elle parle parfaitement le français, et alors?
Je crois que la seule chose qui lui rende justice, ainsi que tous les musiciens de talent, c'est de l'écouter.
Mais comment inspirer à ceux qui lisent ce blog de leur bureau paysager l'envie de cliquer sur elle une fois rentrés dans leur home sweet home? Je l'ignore.



Fredrika Stahl a drop in the sea
Certains morceaux de son nouvel album sont plus rythmés, pop, comme Rocket trip to mars, MOSW, ou plus ballade jazzy comme Song of july et Fast moving train, mais ils sont tous plaisants.
Grâce à elle je m'envole vers ces horizons violets, où les oiseaux chantent à l'unisson les mélodies du bonheur acide, à moins que ce ne soit la mélancolie enchanteresse. Sa voix me réconcilie avec la brutalité du quotidien, déroule son ruban de légèreté sur les heures chaotiques, nécessaire et désaltérante.
Non, décidément, la musique ne se décrit pas, elle se savoure. Écoute-la, et dis-moi si tu aimes.

jeudi 26 août 2010

L'invasion des CHe

J'ignore comment les CHe ont envahi ma vie. Mais le fait est que je n'arrive plus à m'en débarrasser. Car les CHe coupent de l'avant-garde, ils détachent de l'avenir pour nous ancrer dans le présent ordinaire.
Cela a commencé il y a bien longtemps, lorsqu'à l'arrivée de l'homme de ma vie je décidai de céder à la loi de la banalité et de l'appeler "CHéri". Sans en avoir conscience, je fis entrer dans mon intimité les CHe et leur naïveté désespérante.
De "mon CHéri" en "CHéri, où sont les gants de vaisselle", je me condamnai à prononcer plusieurs fois par jour ces CHe ringardisants et trivialisants. La recherche du bien-être, symbolisée par les CHe, allait progressivement endormir mes velléités de rester sur la brèche. Car je l'ignorais à ce moment, il ne s'agissait encore que de la première phase de la stratégie d'invasion systématique de tous les instants de ma vie par ces intrus, jusqu'à en faire un enfer de CHuitements.
En effet, par la suite, outre un CHéri qui n'a pas voulu repartir, c'est un individu de la gent canine qui a apprivoisé mon intérieur. Un CHien, donc. Bien sûr nous n'avons pas eu l'outrecuidance de l'appeler "le CHien", patronyme célèbre de CHiens dans la littérature, à moins qu'il ne s'agisse de celui de Columbo.

CHar pei
Mais nous l'avons surnommé affectueusement, dans notre totale inconscience, "la CHienne", ou plus couramment "CHiéCHiène". On pouvait remarquer au passage que sous couvert de familiarité ordinaire, cette dernière dénomination doublait le nombre des CHe parasites dans le même nom. C'était la marque de fabrique de la contagion des CHe : ils dévoraient insidieusement en toute discrétion. Rien ne les arrêtait, ils prenaient l'être entier. N'ont-ils pas dénaturé même la CHienlit? Je CHerCHai un remède, mais me heurtai aux CHe à chaque détour de phrase. J'ai voulu en maîtriser les effets secondaires les plus néfastes : être dépassé n'était pas agréable. Mais je ne trouvai aucune éCHappatoire dans le fait d'essayer être plus branCHé. La maladie gagnait du terrain. J'en arrivai à ne plus CHavoir où j'en CHuis.
Et le coup de grâce me fut asséné : l'arrivée de notre cHatoune. Nous habitâmes désormais CHez elle, ainsi que tous les serviteurs de CHats. Pourquoi fallait-il que les animaux les plus domestiques de l'homme viennent avec leur cortège de CHe ? CHaton, CHat, CHiot, CHien!

CHaton
J'en appelai à toute la violence de Che guevara pour combattre la mièvrerie de mes CHe, hélas il me déçut par l'angélisme de son visage et l'usure de son image.
A présent les CHe me dominent, et me ramollissent, des dizaines de fois par jour.
Et je ne suis plus capable de faire sortir de mon environnement ceux qui les véhiculent en nombre, car ils ont CHangé mon existence. Je suis accroCHé, que veux tu!
Où est l'heureux temps de mon cynisme défunt, lorsque je croyais que les hommes seraient jetables, ma vie dirigée par la liberté et ma mode du jour chassée par celle du lendemain?
Tu es averti, si tu ne veux pas te faire attendrir par les CHe, ne laisse pas entrer CHez toi la CHaleur et l'attaCHement, car une fois contaminé tu seras enCHaîné. A moins que tu ne le veuilles un CHouya... Ou que tu n'aies déjà succombé à la douce tyrannie des CHe toi aussi.

jeudi 19 août 2010

VOYAGE A LYON 4 : Le confluent

Mon ex, c'est quelqu'un. Il a toujours un pied dans la réalité, l'autre dans son monde imaginaire.
Il m'a fait visiter cet été le nouveau quartier de Lyon, le "Confluent".

travaux confluent 
Voyage à Lyon 4: le confluent au début des travaux
Un lieu anciennement industriel, dans la pointe de la presqu'île, où les deux fleuves se rejoignent, entièrement en rénovation. De gros travaux ont été faits, comprenant la création d'un petit port fluvial.

nouveau quai Lyonpar agayfriday licence cc
Voyage à Lyon 4 : nouveau port confluent de Lyon par agayfriday licence cc
Nous avons franchi allègrement les barrières de chantier, pour bénéficier d'un aperçu de ce que les architectes vont faire de la ville. Les immeubles miroir reflètent toutes les singeries que l'on peut faire devant eux, mais ils ont une certaine majesté dans le soleil.

immeuble miroir Lyon par agayfriday licence cc
Voyage à Lyon 4 : immeuble miroir confluent de Lyon par agayfriday licence cc
Comment s'appelle ce fromage de hollande insolemment coloré en orange, déjà? Ici il est rempli de trous.

immeuble orange Lyon par agayfriday licence cc
Voyage à Lyon 4 : immeuble orange confluent de Lyon par agayfriday licence cc
Que vont faire les pauvres habitants de cet immeuble avec des planchers complètement en pente? Pas étonnant qu'il soit à louer!

immeuble biaiseux Lyon par agayfriday licence cc
Voyage à Lyon 4 : immeuble biaiseux confluent de Lyon par agayfriday licence cc
Ohé, la réunion de chantier, vous devriez la faire ici, on voit beaucoup mieux le problème de loin!

immeuble dissymétrique Lyon par agayfriday licence cc
Voyage à Lyon 4 : immeuble dissymétrique confluent de Lyon par agayfriday licence cc
On crie dans la résonance des futures rues, on arpente la créativité des nombreux escaliers qui tentent de rendre ces dédales contemporains humains, on admire la plastique des ouvriers accablés de chaleur.
Et on s'effondre finalement sur les bancs du nouveau quai de la Saône, en face de l'océan de verdure de l'autre rive.

confluent endormi par agayfriday licence cc
Voyage à Lyon 4 : Confluent endormi confluent de Lyon par agayfriday licence cc
Un très agréable repas pris dans l'un des récents restaurants ouverts sur cette berge, et Pascal s'envole!
voiles confluent de Lyon par agayfriday licence cc
voiles confluent de Lyon par agayfriday licence cc
Un moment d'isolement qui me permet de regarder les convives détendus ou animés, de profiter de l'étrange quiétude de la terrasse voilée perdue dans un océan de modernité.
Il me reste à rentrer me changer pour le soir. Et retrouver la gentillesse du personnel de l'hôtel, ainsi que son atmosphère compassée et antique. Une fin de soirée douce, une nuit tranquille, et je reverrai le lendemain mon accompagnant zélé. Pour qui j'éprouve une grande amitié et beaucoup de tendresse, et qui m'a fait découvrir un nouveau pan de la belle ville de Lyon.

dimanche 15 août 2010

LE PREMIER QUI L'A DIT

Dès le début de ce film on est immergé dans l'Italie contemporaine, celle des villages et d'une fabrique de pâtes. L'intimité d'une de ces familles industrielles qui animent une partie du pays nous accueille.
Elles réussissent car au sein de chaque génération elles trouvent au moins un rejeton, mâle de préférence, qui possède la fibre. Elles cultivent les traditions qui leur ont permis traverser les décennies en s'adaptant.

Le premier qui l'a dit2 Pyramide distribution
Le premier qui l'a dit-pyramide distribution
Le machisme latin s'allie à l'assurance du chef d'entreprise dans le personnage du patriarche qui dirige sa tribu d'une main ferme, et chacun courbe la tête dans l'intérêt général. Mais cette façade minérale cache des failles, les secrets s'accumulent.
Et le fils cadet, justement, recèle un de ces secrets que l'on n'imagine plus cacher au début du vingt et unième siècle en occident : Il veut révéler son homosexualité. Cela va causer un séisme dans la belle villa.
On retrouve dans ce film les ambiances, situations vaudevillesques et humour cocasse des films italiens de la grande époque. L'arrivée des copains très très queer du fils dans la famille traditionnelle fournit quelques scènes d'anthologie, d'une gaité irrésistible.

Le premier qui l'a dit1 Pyramide distribution
Le premier qui l'a dit- pyramide distribution
Les deux acteurs principaux rivalisent de charme, ce qui ne gâte rien.
Entre rire et émotion, c'est mon coup de cœur de l'année, et j'ai l'impression qu'il le restera jusqu'en décembre.

samedi 7 août 2010

LYON 2,3 : la discrète

Lyon se veut secrète, mais juste parce que dans la discrétion on travaille mieux. Nichée au creux du lyonnais (Le grand Lyon a mangé presque tout le département), La ville des Gaules t'accueille dans la douceur, Elle t'enveloppe de ses reflets ambigus.
barque saône Lyon par agayfriday licence cc
D'emblée Elle t'avoue qu'elle te trompera, qu'elle ne se donnera pas facilement. Elle va te dérouter, se cacher, un peu exprès. Suis-tu ses panneaux indicateurs? tu tournes en rond, à la recherche de ses trois ou cinq centres. Pour commencer, Elle te conseille son Vieux Lyon, n'y va pas en voiture, malheureux! Tu t'engages pedibus gambus dans ses étroites rues, que l'on peut relier en traboulant à travers les immeubles, au risque d'y perdre le nord. C'est ravissant et désuet. Puis tu grimpes jusqu'à ce que tu crois être sa cathédrale, mais tu ne rencontres que le désert de Fourvière.
bellecour Fourvière par agayfriday licence cc
Tu retournes sur tes pas, sur la belle place Bellecour, au pied du cheval est le point de rencontre, mais est-ce vraiment le centre?
bellecour par agayfriday licence cc
Où que tu sois la basilique sur la colline qui prie te voit, mais chut, ne dis pas la basilique, ça ne se fait pas, dis plutôt Fourvière, ou parle d'elle par son petit nom, "l'éléphant".
fourvièrepar agayfriday licence cc
Elle appartient aux lyonnais, ils ont bien le droit de l'appeler comme ils veulent, non? Et puis avec ce nom là, on la pressent davantage protection bienveillante. On te racontera qu'elle est consacrée à Marie, ce qui est vrai, et qu'on la fête le 8 décembre en commémoration d'un vœu de 1643 pour échapper à la peste, une information falsifiée. La fête à Marie a lieu le 8 septembre en fait, et ce sont les lyonnais, jamais à court d'un pied de nez, qui illuminent depuis 1852 la fête des Lumières du 8 décembre!
De bellecour, tu es guidé vers la place des Terreaux, la fontaine Bartholdi séculaire est consacrée au deux fleuves, sûrement la Saône et le Rhône, penses tu?
Fontaine_Bartholdi par Aroyosmage dp
fontaine Bartholdi par aroyosmage domaine public
Que nenni, ce sont la Dordogne et la Garonne, puisqu'elle était destinée à Bordeaux à l'origine. Et elle trône au milieu de la place depuis...1992 seulement. Avant, elle était à quelques dizaines de mètres, sur le petit coté.
Puisque tu es ici, entre au musée des beaux-arts, il cache son trésor. La grande ville s'efface et tu es dans un petit cloître hors du temps et du bruit. J'y allais souvent grignoter, et rêvasser sur un banc de bois, en compagnie d'hommes nus figés pour l'éternité.

Jardin_st_pierre par aymeric Lopez licence gnu
jardin musée beaux arts par Aymeric Lopez licence gnu
Tout près tu imagines que l'opéra va te proposer un monument sans surprise, de 1831, c'est un classique du 19ème. Mais tu lèves les yeux : Eh oui, il est trompeur, lui aussi. J'ai vu lorsqu'ils l'ont vidé comme un pot de glace, ne laissant que la façade. Puis la haute verrière a poussé, et depuis 1993 lui aussi est Nouvel, Jean Nouvel. De là il est simple de monter à la Croix Rousse, la colline qui travaille, et tu croiseras sur les pentes les artistes, avant de parvenir dans un village très vivant, en pleine ville. Tu chercheras vainement la croix rousse en question, il n'y a qu'un caillou, mais un gros, parfois déguisé.

presqu'île Lyon
presqu'île par agayfriday droits de la photo licence cc. droits du trompe l'oeil réservés au créateur.
L'esprit de contradiction te suivra en direction du dernier centre en date, la Part Dieu. Pas sûr que Dieu y retrouve sa part, car le centre économique de la ville y bat le vingt et unième siècle capitaliste et rationnel.
Tu vois, Lyon cache son jeu, grande ville provinciale, petite métropole ultra branchée.
Je devrais encore te présenter Villeurbanne, ville de banlieue incluse dans la ville, à l'intérieur du périphérique. Bien entendu on ne le nomme pas périphérique, ce serait trop simple, c'est la rocade. A Villeurbanne, le quartier des gratte-ciels mérite amplement ton coup d'œil, superbe ensemble 1930, où tu ne verras bien entendu aucun... véritable gratte-ciel!
Enfin tu renonces à la logique, acceptes de laisser Lyon t'apprivoiser, musardes avec la Saône,

la saône agayfriday licence cc
La saône par agayfriday sous licence cc
parcours les quais du Rhône en amoureux, et avec un peu de patience, tu lèveras tous Ses jolis ou déconcertants secrets.