jeudi 26 août 2010

L'invasion des CHe

J'ignore comment les CHe ont envahi ma vie. Mais le fait est que je n'arrive plus à m'en débarrasser. Car les CHe coupent de l'avant-garde, ils détachent de l'avenir pour nous ancrer dans le présent ordinaire.
Cela a commencé il y a bien longtemps, lorsqu'à l'arrivée de l'homme de ma vie je décidai de céder à la loi de la banalité et de l'appeler "CHéri". Sans en avoir conscience, je fis entrer dans mon intimité les CHe et leur naïveté désespérante.
De "mon CHéri" en "CHéri, où sont les gants de vaisselle", je me condamnai à prononcer plusieurs fois par jour ces CHe ringardisants et trivialisants. La recherche du bien-être, symbolisée par les CHe, allait progressivement endormir mes velléités de rester sur la brèche. Car je l'ignorais à ce moment, il ne s'agissait encore que de la première phase de la stratégie d'invasion systématique de tous les instants de ma vie par ces intrus, jusqu'à en faire un enfer de CHuitements.
En effet, par la suite, outre un CHéri qui n'a pas voulu repartir, c'est un individu de la gent canine qui a apprivoisé mon intérieur. Un CHien, donc. Bien sûr nous n'avons pas eu l'outrecuidance de l'appeler "le CHien", patronyme célèbre de CHiens dans la littérature, à moins qu'il ne s'agisse de celui de Columbo.

CHar pei
Mais nous l'avons surnommé affectueusement, dans notre totale inconscience, "la CHienne", ou plus couramment "CHiéCHiène". On pouvait remarquer au passage que sous couvert de familiarité ordinaire, cette dernière dénomination doublait le nombre des CHe parasites dans le même nom. C'était la marque de fabrique de la contagion des CHe : ils dévoraient insidieusement en toute discrétion. Rien ne les arrêtait, ils prenaient l'être entier. N'ont-ils pas dénaturé même la CHienlit? Je CHerCHai un remède, mais me heurtai aux CHe à chaque détour de phrase. J'ai voulu en maîtriser les effets secondaires les plus néfastes : être dépassé n'était pas agréable. Mais je ne trouvai aucune éCHappatoire dans le fait d'essayer être plus branCHé. La maladie gagnait du terrain. J'en arrivai à ne plus CHavoir où j'en CHuis.
Et le coup de grâce me fut asséné : l'arrivée de notre cHatoune. Nous habitâmes désormais CHez elle, ainsi que tous les serviteurs de CHats. Pourquoi fallait-il que les animaux les plus domestiques de l'homme viennent avec leur cortège de CHe ? CHaton, CHat, CHiot, CHien!

CHaton
J'en appelai à toute la violence de Che guevara pour combattre la mièvrerie de mes CHe, hélas il me déçut par l'angélisme de son visage et l'usure de son image.
A présent les CHe me dominent, et me ramollissent, des dizaines de fois par jour.
Et je ne suis plus capable de faire sortir de mon environnement ceux qui les véhiculent en nombre, car ils ont CHangé mon existence. Je suis accroCHé, que veux tu!
Où est l'heureux temps de mon cynisme défunt, lorsque je croyais que les hommes seraient jetables, ma vie dirigée par la liberté et ma mode du jour chassée par celle du lendemain?
Tu es averti, si tu ne veux pas te faire attendrir par les CHe, ne laisse pas entrer CHez toi la CHaleur et l'attaCHement, car une fois contaminé tu seras enCHaîné. A moins que tu ne le veuilles un CHouya... Ou que tu n'aies déjà succombé à la douce tyrannie des CHe toi aussi.

jeudi 19 août 2010

VOYAGE A LYON 4 : Le confluent

Mon ex, c'est quelqu'un. Il a toujours un pied dans la réalité, l'autre dans son monde imaginaire.
Il m'a fait visiter cet été le nouveau quartier de Lyon, le "Confluent".

travaux confluent 
Voyage à Lyon 4: le confluent au début des travaux
Un lieu anciennement industriel, dans la pointe de la presqu'île, où les deux fleuves se rejoignent, entièrement en rénovation. De gros travaux ont été faits, comprenant la création d'un petit port fluvial.

nouveau quai Lyonpar agayfriday licence cc
Voyage à Lyon 4 : nouveau port confluent de Lyon par agayfriday licence cc
Nous avons franchi allègrement les barrières de chantier, pour bénéficier d'un aperçu de ce que les architectes vont faire de la ville. Les immeubles miroir reflètent toutes les singeries que l'on peut faire devant eux, mais ils ont une certaine majesté dans le soleil.

immeuble miroir Lyon par agayfriday licence cc
Voyage à Lyon 4 : immeuble miroir confluent de Lyon par agayfriday licence cc
Comment s'appelle ce fromage de hollande insolemment coloré en orange, déjà? Ici il est rempli de trous.

immeuble orange Lyon par agayfriday licence cc
Voyage à Lyon 4 : immeuble orange confluent de Lyon par agayfriday licence cc
Que vont faire les pauvres habitants de cet immeuble avec des planchers complètement en pente? Pas étonnant qu'il soit à louer!

immeuble biaiseux Lyon par agayfriday licence cc
Voyage à Lyon 4 : immeuble biaiseux confluent de Lyon par agayfriday licence cc
Ohé, la réunion de chantier, vous devriez la faire ici, on voit beaucoup mieux le problème de loin!

immeuble dissymétrique Lyon par agayfriday licence cc
Voyage à Lyon 4 : immeuble dissymétrique confluent de Lyon par agayfriday licence cc
On crie dans la résonance des futures rues, on arpente la créativité des nombreux escaliers qui tentent de rendre ces dédales contemporains humains, on admire la plastique des ouvriers accablés de chaleur.
Et on s'effondre finalement sur les bancs du nouveau quai de la Saône, en face de l'océan de verdure de l'autre rive.

confluent endormi par agayfriday licence cc
Voyage à Lyon 4 : Confluent endormi confluent de Lyon par agayfriday licence cc
Un très agréable repas pris dans l'un des récents restaurants ouverts sur cette berge, et Pascal s'envole!
voiles confluent de Lyon par agayfriday licence cc
voiles confluent de Lyon par agayfriday licence cc
Un moment d'isolement qui me permet de regarder les convives détendus ou animés, de profiter de l'étrange quiétude de la terrasse voilée perdue dans un océan de modernité.
Il me reste à rentrer me changer pour le soir. Et retrouver la gentillesse du personnel de l'hôtel, ainsi que son atmosphère compassée et antique. Une fin de soirée douce, une nuit tranquille, et je reverrai le lendemain mon accompagnant zélé. Pour qui j'éprouve une grande amitié et beaucoup de tendresse, et qui m'a fait découvrir un nouveau pan de la belle ville de Lyon.

dimanche 15 août 2010

LE PREMIER QUI L'A DIT

Dès le début de ce film on est immergé dans l'Italie contemporaine, celle des villages et d'une fabrique de pâtes. L'intimité d'une de ces familles industrielles qui animent une partie du pays nous accueille.
Elles réussissent car au sein de chaque génération elles trouvent au moins un rejeton, mâle de préférence, qui possède la fibre. Elles cultivent les traditions qui leur ont permis traverser les décennies en s'adaptant.

Le premier qui l'a dit2 Pyramide distribution
Le premier qui l'a dit-pyramide distribution
Le machisme latin s'allie à l'assurance du chef d'entreprise dans le personnage du patriarche qui dirige sa tribu d'une main ferme, et chacun courbe la tête dans l'intérêt général. Mais cette façade minérale cache des failles, les secrets s'accumulent.
Et le fils cadet, justement, recèle un de ces secrets que l'on n'imagine plus cacher au début du vingt et unième siècle en occident : Il veut révéler son homosexualité. Cela va causer un séisme dans la belle villa.
On retrouve dans ce film les ambiances, situations vaudevillesques et humour cocasse des films italiens de la grande époque. L'arrivée des copains très très queer du fils dans la famille traditionnelle fournit quelques scènes d'anthologie, d'une gaité irrésistible.

Le premier qui l'a dit1 Pyramide distribution
Le premier qui l'a dit- pyramide distribution
Les deux acteurs principaux rivalisent de charme, ce qui ne gâte rien.
Entre rire et émotion, c'est mon coup de cœur de l'année, et j'ai l'impression qu'il le restera jusqu'en décembre.

samedi 7 août 2010

LYON 2,3 : la discrète

Lyon se veut secrète, mais juste parce que dans la discrétion on travaille mieux. Nichée au creux du lyonnais (Le grand Lyon a mangé presque tout le département), La ville des Gaules t'accueille dans la douceur, Elle t'enveloppe de ses reflets ambigus.
barque saône Lyon par agayfriday licence cc
D'emblée Elle t'avoue qu'elle te trompera, qu'elle ne se donnera pas facilement. Elle va te dérouter, se cacher, un peu exprès. Suis-tu ses panneaux indicateurs? tu tournes en rond, à la recherche de ses trois ou cinq centres. Pour commencer, Elle te conseille son Vieux Lyon, n'y va pas en voiture, malheureux! Tu t'engages pedibus gambus dans ses étroites rues, que l'on peut relier en traboulant à travers les immeubles, au risque d'y perdre le nord. C'est ravissant et désuet. Puis tu grimpes jusqu'à ce que tu crois être sa cathédrale, mais tu ne rencontres que le désert de Fourvière.
bellecour Fourvière par agayfriday licence cc
Tu retournes sur tes pas, sur la belle place Bellecour, au pied du cheval est le point de rencontre, mais est-ce vraiment le centre?
bellecour par agayfriday licence cc
Où que tu sois la basilique sur la colline qui prie te voit, mais chut, ne dis pas la basilique, ça ne se fait pas, dis plutôt Fourvière, ou parle d'elle par son petit nom, "l'éléphant".
fourvièrepar agayfriday licence cc
Elle appartient aux lyonnais, ils ont bien le droit de l'appeler comme ils veulent, non? Et puis avec ce nom là, on la pressent davantage protection bienveillante. On te racontera qu'elle est consacrée à Marie, ce qui est vrai, et qu'on la fête le 8 décembre en commémoration d'un vœu de 1643 pour échapper à la peste, une information falsifiée. La fête à Marie a lieu le 8 septembre en fait, et ce sont les lyonnais, jamais à court d'un pied de nez, qui illuminent depuis 1852 la fête des Lumières du 8 décembre!
De bellecour, tu es guidé vers la place des Terreaux, la fontaine Bartholdi séculaire est consacrée au deux fleuves, sûrement la Saône et le Rhône, penses tu?
Fontaine_Bartholdi par Aroyosmage dp
fontaine Bartholdi par aroyosmage domaine public
Que nenni, ce sont la Dordogne et la Garonne, puisqu'elle était destinée à Bordeaux à l'origine. Et elle trône au milieu de la place depuis...1992 seulement. Avant, elle était à quelques dizaines de mètres, sur le petit coté.
Puisque tu es ici, entre au musée des beaux-arts, il cache son trésor. La grande ville s'efface et tu es dans un petit cloître hors du temps et du bruit. J'y allais souvent grignoter, et rêvasser sur un banc de bois, en compagnie d'hommes nus figés pour l'éternité.

Jardin_st_pierre par aymeric Lopez licence gnu
jardin musée beaux arts par Aymeric Lopez licence gnu
Tout près tu imagines que l'opéra va te proposer un monument sans surprise, de 1831, c'est un classique du 19ème. Mais tu lèves les yeux : Eh oui, il est trompeur, lui aussi. J'ai vu lorsqu'ils l'ont vidé comme un pot de glace, ne laissant que la façade. Puis la haute verrière a poussé, et depuis 1993 lui aussi est Nouvel, Jean Nouvel. De là il est simple de monter à la Croix Rousse, la colline qui travaille, et tu croiseras sur les pentes les artistes, avant de parvenir dans un village très vivant, en pleine ville. Tu chercheras vainement la croix rousse en question, il n'y a qu'un caillou, mais un gros, parfois déguisé.

presqu'île Lyon
presqu'île par agayfriday droits de la photo licence cc. droits du trompe l'oeil réservés au créateur.
L'esprit de contradiction te suivra en direction du dernier centre en date, la Part Dieu. Pas sûr que Dieu y retrouve sa part, car le centre économique de la ville y bat le vingt et unième siècle capitaliste et rationnel.
Tu vois, Lyon cache son jeu, grande ville provinciale, petite métropole ultra branchée.
Je devrais encore te présenter Villeurbanne, ville de banlieue incluse dans la ville, à l'intérieur du périphérique. Bien entendu on ne le nomme pas périphérique, ce serait trop simple, c'est la rocade. A Villeurbanne, le quartier des gratte-ciels mérite amplement ton coup d'œil, superbe ensemble 1930, où tu ne verras bien entendu aucun... véritable gratte-ciel!
Enfin tu renonces à la logique, acceptes de laisser Lyon t'apprivoiser, musardes avec la Saône,

la saône agayfriday licence cc
La saône par agayfriday sous licence cc
parcours les quais du Rhône en amoureux, et avec un peu de patience, tu lèveras tous Ses jolis ou déconcertants secrets.